La RRQ vs les jeunes, les invalides et les veuves

La Régie des rentes du Québec a lancé un document de consultation sur un projet de réforme avec le titre racoleur «Vers un Régime de rentes du Québec renforcé et plus équitable». Celui-ci contient des recommandations particulièrement inquiétantes pour les jeunes travailleurs qui voudraient éventuellement prendre leur retraite avant 65 ans, les personnes qui souffriront d’une invalidité entre 60 et 65 ans et les femmes qui auront le malheur de perdre leur conjoint avant l’âge de 65 ans.

Ce document arrive dans un contexte particulier. Premièrement, nous ne pouvons pas passer sous silence le problème de la santé financière de la Caisse de dépôt et de placement du Québec. Selon Michel Nadeau, ex-p.-d.g. de la Caisse, les pertes de celle-ci seraient d’environ de 30 milliards de dollars (1). Mentionnons, de plus, que la Caisse vient de transformer ses investissements dans le papier commercial adossé à  des actifs (PCCA), soit 13,2 sur un total de 150 milliards de dollars (2), en investissements à  long terme. Investissements qui seront gelés pendant plusieurs années et qui ne rapporteront pas d’intérêt pendant cette période indéfinie. Ce qui gonfle dangereusement la manque à  gagner de la Caisse. Deuxièmement, en raison de sa réalité démographique, le Québec souffre d’un manque cruel de main d’oeuvre, problème qui va s’accentuer au cours des prochaines années. Voilà  deux réalités que nous ne devons pas oublier lors de la lecture du document de consultation de la Régie des rentes.

Une réalité noircie à  dessein La dernière augmentation à  9,9% du taux de la cotisation à  la Régie des rentes devait assurer sa sécurité financière jusqu’en 2050. Mais voilà  qu’en raison du vieillissement plus accentué de la population et des nouvelles réalités du marché du travail, les actuaires de la Régie revisent leurs hypothèses et en arrivent à  la conclusion que le taux actuel de la cotisation ne serait plus suffisant. D’où la nécessité de le hausser à  nouveau, cette fois jusqu’à  un maximum de 10,4% et, même, de réduire certains bénéfices des participants.

Le premier groupe qui serait coupé:

les travailleurs qui prendraient leur retraite avant 65 ans. Actuellement, dans le calcul de la rente d’un individu, la Régie peut supprimer les mois qui ont été les moins bons (jusqu’à  un maximum de 15%) pendant sa carrière. Le document de la Régie propose d’enlever cette possibilité. Ce qui pénaliserait un bon nombre de jeunes travailleurs qui ne vivent plus dans un contexte leur permettant de faire carrière chez un seul employeur, mais bien de devoir passer par des périodes successives d’emploi, de chômage, d’études, de congés sans solde etc. Ceux qui prendraient leur retraite avant 65 ans (la moyenne au Québec est de 62 ans) seraient particulièrement pénalisés. Il est à  noter que les individus qui sont actuellement de jeunes retraités seraient aussi affectés par cette nouvelles méthode de calcul lorsqu’ils demanderont de recevoir leur rente de retraite à  la Régie, après avoir atteint l’âge de 60 ans.

Le deuxième groupe touché par les coupures proposées:

les personnes invalides entre 60 et 65 ans. Est reconnu comme invalide par la Régie et reçoit une rente à  cet effet, celui qui, ayant moins de 60 ans, est incapable d’occuper un emploi rémunérateur. Pour l’individu ayant entre 60 et 65 ans, la définition est plus assouplie: n’être plus en mesure d’occuper son dernier emploi. La Régie voudrait abolir cette dernière définition pour forcer la personne se retrouvant avec des capacités réduites à  se trouver un nouvel emploi à  sa mesure chez le même employeur ou chez un autre employeur. De plus, la nouvelle méthode de calcul diminue le montant de la rente auquel ces personnes auraient droit.

Le troisième groupe visé: les veuves de moins de 65 ans.

Les conjoints survivants ayant moins de 65 ans, qui sont souvent des conjointes parce que les femmes vivent plus longtemps en moyenne, n’auraient droit qu’à  une rente temporaire versée pendant 10 ans, plutôt que pendant leur vie entière. De plus, la nouvelle méthode de calcul réduit le montant de la rente pour tous les conjoints survivants, quelque soit leur âge. En contrepartie, la rente mensuelle d’orphelin serait haussée de 66$ à  209$, mais toujours retirée à  l’âge de 18 ans. Ce qui n’est pas un incitatif à  poursuivre des études.

Manifestement, dans son document de consultation, la Régie des rentes du Québec vise à  trouver des solutions aux deux problèmes plus haut mentionnés: les difficultés financières de la Caisse de dépôt et la pénurie de main d’oeuvre. Ce faisant, elle s’en prend à  des groupes particulièrement vulnérables: de jeunes travailleurs pour qui la retraite est encore lointaine et des personnes qui ne savent pas qu’elles seront un jour soit invalides soit veuves. Dans ce dernier cas, les propositions de la Régie auraient pour effet de grossir un ghetto de pauvreté, soit celui des femmes âgées vivant seules.

Voir aussi ce qu’en pense Michel Lizée du SCFP.

Ce contenu a été publié dans Finances, RRQ par Jean Laflèche. Mettez-le en favori avec son permalien.
Jean Laflèche

A propos Jean Laflèche

Retraité depuis juillet 2000, j'appartiens aux Retraités-es du 429 (SFMM-SCFP). Je représente d'ailleurs cette accréditation auprès du RSR depuis 2003. Je suis l'Édimestre du RSR et de la FSRQ. Quand j'ai du temps, je bricole... !

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